On se fait à l’idée et c’est Moi qu’on assassine

Description

Après le dernier concert (c’est juré), la tragédie… Des fois, Johnny, ça peut faire très mal…ExtraitÀ Pierre Delorme.Cette courte pièce réunit deux personnages.Lui : c’est un collectionneur fou, un « complétiste », un johnnymaniaque, il a tout : les 45-tours simples et les extended play, les vinyles, les CD, les éditions originales et les rééditions, les tirages limités (dont un concert dans un briquet), les compilations, les cassettes et même les cartouches 8-pistes (ce format oublié), l’appareil qui joue les cartouches 8-pistes, et la décapotable, écrin incontournable de l’appareil qui joue les cartouches 8-pistes. Les soirs d’été il va sur la corniche où l’on roule en décapotable, le bras de la main qui ne conduit pas négligemment posé sur le montant de la portière. Il connaît tout, bien sûr, et puis surtout il aime tout : les bonnes chansons (La Génération perdue, Quelque chose de Tennessee…), les honnêtes (Toute la musique que j’aime, Oh ! ma jolie Sarah…), les erreurs de casting (Itsy, Bitsy, petit bikini, San Francisco…) et même l’improbable Montpellier (qui sait ce qu’avait pris Johnny le jour où il a enregistré Montpellier, sûrement pas la direction… artistique). Et Moi, ça l’énerve, les gens comme Lui qui aiment tout !Moi : ben, c’est Moi quoi… Vous le connaissez… Il n’aime pas parler de lui. De toute façon, depuis qu’il s’est énervé après Lui, il n’a plus rien à dire à personne.MoiToc, toc, toc.Lui                     Qui est là ?Moi                                         Votre voisin, monsieur.  LuiEt que me vaut de voir votre face d’endiveÀ cette heure sinon indue, du moins tardive ?MoiIl se fait que j’entends d’étranges bruits d’essieux.LuiPlaît-il ?Moi               Avec paroles et accompagnement,  Qui traversent les murs de votre appartement.Lui(montant comme le lait sur le feu)Le diable me pardonne et Dieu me patafiole,De l’immense Johnny vous paieriez-vous la fiole ?Vous allez en répondre, ô sinistre faquin !                                (… avant de redescendre avec un sourire vaguement entendu)Dites c’était pour rire ? Vous n’êtes qu’un taquin ?MoiPas du tout cher monsieur, je suis on ne peut plus…LuiSérieux ?Moi                   Parfaitement. Et il ne m’a pas plu  De vous voir en douter même un instant. Je crois…Lui (arrogant)Vous croyez !Moi                       Oui, je crois qu’il faut que nous ayons  Un échange courtois mais ferme, sans passion,Ou nous ne pourrons plus vieillir au même endroit.Faut vous faire à l’idée, je n’aime pas Johnny.Déjà que je n’ai pas regardé la Finale…LuiEn quatre-vingt-dix-huit ?Moi                                        Eh oui ! je suis bancal.